top of page
Photo du rédacteurServices provinciaux

Comment François monta une crèche, un jour de noël 1223

Dernière mise à jour : 20 déc. 2018

Thomas de Celano (+ 1263)



Son idéal bien arrêté, son désir le plus ardent, sa volonté la plus ferme étaient d’observer le saint Évangile, d’en observer tous les points, et en toute circonstance, de se conformer parfaitement, avec zèle, application, élan et ferveur, à la doctrine de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et d’imiter ses exemples. Il évoquait ses paroles dans une méditation assidue et entretenait par une profonde contemplation le souvenir de ses actes. Deux sujets surtout l’empoignaient tellement qu’il pouvait à peine penser à autre chose : l’humilité manifestée par l’Incarnation et l’amour manifesté par la Passion.


C’est pourquoi je veux conserver pieusement le souvenir de ce qu’il fit à Greccio un jour de Noël, trois ans avant sa mort. Il y avait dans cette province un homme appelé Jean, de bonne renommée, de vie meilleure encore, et le bienheureux François l’aimait beaucoup parce que, malgré son haut lignage et ses importantes charges, il n’accordait aucune valeur à la noblesse du sang et désirait acquérir celle de l’âme. Une quinzaine de jours avant Noël, François le fit appeler comme il le faisait souvent.


« Si tu veux bien, lui dit-il, célébrons à Greccio la prochaine fête du Seigneur ; pars dès maintenant et occupe-toi des préparatifs que je vais t’indiquer. Je veux évoquer en effet le souvenir de l’Enfant qui naquit à Bethléem et de tous les désagréments qu’il endura dès son enfance ; je veux le voir, de mes yeux de chair, tel qu’il était, couché dans une mangeoire et dormant sur le foin, entre un bœuf et un âne. » L’ami fidèle courut en toute hâte préparer au village en question ce qu’avait demandé le saint.


Le jour de joie arriva, le temps de l’allégresse commença. On convoqua les frères de plusieurs couvents des environs. Hommes et femmes, les gens du pays, l’âme en fête, préparèrent, chacun selon ses possibilités, des torches et des cierges pour rendre lumineuse cette nuit qui vit se lever l’Astre étincelant éclairant tous les siècles. En arrivant, le saint vit que tout était prêt et se réjouit fort. On avait apporté une mangeoire et du foin, on avait amené un âne et un bœuf.

Là vraiment la simplicité était à l’honneur, c’était le triomphe de la pauvreté, la meilleure leçon d’humilité ; Greccio était devenu un nouveau Bethléem. La nuit se fit aussi lumineuse que le jour et aussi délicieuse pour les animaux que pour les hommes. Les foules accoururent, et le renouvellement du mystère renouvela leurs motifs de joie. Les bois retentissaient de chants, et les montagnes en répercutaient les joyeux échos. Les frères chantaient les louanges du Seigneur, et toute la nuit se passa dans la joie. Le saint passa la veillée debout devant la crèche, brisé de compassion, rempli d’une indicible joie. Enfin l’on célébra la messe sur la mangeoire comme autel, et le prêtre qui célébra ressentit une piété jamais éprouvée jusqu’alors.

François revêtit la dalmatique, car il était diacre, et chanta l’Évangile d’une voix sonore. Sa voix vibrante et douce, claire et sonore, invitait tous les assistants aux plus hautes joies. Il prêcha ensuite au peuple et trouva des mots doux comme le miel pour parler de la naissance du pauvre Roi et de la petite ville de Bethléem. Parlant du Christ Jésus, il l’appelait avec beaucoup de tendresse « l’enfant de Bethléem », et il clamait ce « Bethléem » qui se prolongeait comme un bêlement d’agneau, il faisait passer par sa bouche toute sa voix et tout son amour. On pouvait croire, lorsqu’il disait « Jésus » ou « enfant de Bethléem » qu’il se passait la langue sur les lèvres comme pour savourer la douceur de ces mots.


Au nombre des grâces prodiguées par le Seigneur en ce lieu, on peut compter la vision admirable dont un homme de grande vertu reçut alors la faveur. Il aperçut couché dans la mangeoire un petit enfant immobile que l’approche du saint parut tirer du sommeil. Cette vision échut vraiment bien à propos, car l’Enfant-Jésus était, de fait, endormi dans l’oubli au fond de bien des cœurs jusqu’au jour où, par son serviteur François, son souvenir fut ranimé et imprimé de façon indélébile dans les mémoires. Après la clôture des solennités de la nuit, chacun rentra chez soi, plein d’allégresse.


On conserva du foin de la crèche « afin que Yahweh guérisse le bétail, si grande est sa miséricorde » ! En effet, beaucoup d’animaux de la région, atteints de diverses maladies, mangèrent de ce foin et furent guéris. Bien mieux, des femmes qui, au cours d’enfantements laborieux et pénibles, se munirent de quelques brins, accouchèrent heureusement. Des foules d’hommes et de femmes purent de la même façon recouvrer la santé.


La crèche est devenue un temple consacré au Seigneur ; sur l’emplacement de la mangeoire, un autel est construit en l’honneur du bienheureux Père François, afin que là où des animaux ont autrefois mangé leur nourriture composée de foin, les hommes mangent désormais, pour la santé de leur âme et de leur corps, la chair de l’Agneau sans tache, Jésus-Christ Notre Seigneur, qui, dans son immense et ineffable amour, se donna lui-même à nous, lui qui vit et règne éternellement glorieux avec le Père et le Saint-Esprit dans tous les siècles des siècles. Amen. Alleluia, Alleluia !


Ici finit le premier opuscule de la vie et des actes du bienheureux François.


Première vie de Saint Francois d’assise, chapitre 30, 84 - 87



107 vues0 commentaire

Kommentare


bottom of page